La Révolte des Premiers de la classe

Par Jean-Laurent Cassely

Broché (17,90 €)

Disponible sur Amazon, Fnac ou En librairie

Ebook (12,00)

Disponible ci dessous au format PDF

208 pages

En bref

Vous vous ennuyez au travail malgré de bonnes études ? Vous vous sentez inutile ? Rassurez-vous, vous n’êtes pas seul. Chez les jeunes diplômés les défections pleuvent et la révolte gronde : démissions, reconversions, engagement pour le climat et exode urbain sont les signes annonciateurs d’une société qui entre massivement en quête de sens. 

Cet essai précurseur, réactualisé et augmenté de prolongements inédits, décrypte les aspirations des jeunes générations, dévoile les causes de leur mal-être en entreprise et raconte leur recherche d’une vie en accord avec leurs valeurs. Diplômés de grandes écoles inscrits en C. A. P., cadres en reconversion dans le petit commerce ou les métiers du bien-être, consultants-restaurateurs ou ingénieurs-paysans… Ces bifurcations de vie radicales redessinent nos villes et nos campagnes, remettent en question nos modes de vie et redéfinissent notre vision du succès. Dans un monde en transition et en quête de nouveaux récits, cette élite alternative peut-elle entraîner le reste de la société ? 

Alors, faut-il vraiment passer un C. A. P. cuisine après un bac +5 et quitter la Défense pour le sud de la Drôme ?

Jean-Laurent Cassely est journaliste et essayiste, spécialiste des modes de vie et des questions territoriales. Il est le co-auteur avec Jérôme Fourquet de La France sous nos yeux, vendu à plus de 100 000 exemplaires. Il a également écrit No Fake, Contre-histoire de notre quête d’authenticité, chez Arkhê.

 

 

Presse

Le Monde

Jean-Laurent Cassely explore avec ­minutie cette fièvre de la reconversion qui s’est emparée de l’époque. 

Le Figaro

Un essai prémonitoire […]

Dans son ouvrage La Révolte des premiers de la classe paru ce mois-ci aux éditions Arkhê, le journaliste Jean-Laurent Cassely décrypte le phénomène des «néo-artisans», ces jeunes cadres brusquement reconvertis au travail manuel par quête de sens et peur du déclassement social.

Les Inrocks

Dans une enquête documentée, « La révolte des premiers de la classe », Jean-Laurent Cassely dresse le constat d’un changement en cours du rapport au travail. Contre les métiers à la con, qui minent leurs vies, ces nouveaux travailleurs aspirent à des métiers concrets, auxquels ils confèrent du sens. Aux codes usés et usants de cette société salariale, où règne la règle de l’abstraction, les nouvelles générations de jeunes diplômés, lucides, s’opposent ainsi de plus en plus, en exprimant leur souci d’échapper à cette loi d’airain de l’entreprise capitaliste qui sacrifie toute quête de sens individuelle sur l’autel de sa pure rentabilité […]

Les Échos

Vous en connaissez peut-être déjà dans votre entourage. Ces jeunes déserteurs d’openspaces sont en effet de plus en plus nombreux à opter pour une reconversion radicale dans le commerce local ou l’artisanat comme Gautier, ancien banquier qui a ouvert une épicerie fine ou Marie, ingénieure qui a lâché son boulot de consultante pour devenir crémière, raconte dans son livre Jean-Laurent Cassely […]

Sommaire

Avant-propos

I.

Faut-il passer un C.A.P. cuisine après Sciences Po et H.E.C. ?

II.

Dans la fabrique des métiers à la con

III.

Le déclassement qui vient

IV.

Le bonheur est dans le concret

V.

Faire et vendre : deux manières de retrouver du sens

VI.

Du retour à la terre au nouveau village urbain ?

VII.

Le charme discret de la montée en gamme

VIII.
Une nouvelle bourgeoisie de proximité ?

Épilogue

Extrait

C.A.P. is the new H.E.C. : le grand retour du métier « manuel »

La manière la plus radicale de renouer avec la concrétude du travail passe, pour les manipulateurs d’abstractions en crise existentielle, par la redécouverte de sa dimension manuelle, c’est-à-dire la production. On reconnaît dans ce profil les bataillons de cadres sup’ dont les portraits tapissent les magazines et suppléments consacrés aux consultants devenus pâtissiers, chargés d’études désormais boulangers et autres plombiers issus de Sciences Po. Pour ce public avide de « faire », le retour à l’école s’impose bien souvent pour apprendre le métier dans le cadre d’une formation courte – souvent l’iconique C.A.P., ou Certificat d’aptitude professionnelle. Notre diplômé de l’enseignement supérieur et ancien cadre, qui garde un souvenir plus ou moins lointain de son passage sur les bancs de la fac, se retrouvera donc en formation de C.A.P. pour adulte en pâtisserie, cuisine ou ébénisterie, qui correspond au niveau V – le plus bas selon la classification de l’Éducation nationale. Créé au début du xxe siècle, le C.A.P. répond alors aux besoins de main d’œuvre des employeurs, et donne une qualification de niveau ouvrier ou employé qualifié. C’est un diplôme qui valide une expérience pratique et immédiatement opérationnelle, le candidat devant obligatoirement valider une période en milieu professionnel pour être reçu.

Parce que le diplôme est une façon de trier socialement les individus, « rétrograder » dans les niveaux d’éducation s’apparente à une véritable transgression. Les pionniers en ont fait les frais. En 1999, Emmanuelle, haut cadre de direction dans l’énergie expatriée à Londres, se souvient des réactions provoquées par l’annonce de son choix précurseur de se reconvertir dans la restauration. « À mon époque, j’étais vue comme une sorte d’Ovni, et mon patron m’avait dit : “surtout n’en parle à personne, c’est mauvais pour ta carrière” ». Face à de jeunes apprentis en formation initiale ou à des publics éloignés de l’emploi, le candidat rompu à l’impitoyable compétition scolaire des concours et classes prépa passera sans encombre les étapes théoriques, d’une facilité déconcertante par rapport à son niveau, mais expérimentera en revanche un avant-goût de la vie d’atelier ou de brigade de cuisine, avec tout le folklore qui va avec… Horaires éprouvants, promiscuité et langage cru en prime, à des années-lumière de l’atmosphère aseptisée des salles de réunion vitrées qui trônent au milieu des open-spaces. Il mesurera un peu mieux la distance entre son image parfois idéalisée de l’artisanat et les manières de faire, déroutantes pour le nouvel entrant, de corporations qui ne voient pas toujours d’un bon œil que l’on vienne bouleverser leurs habitudes et leur équilibre. Après ses deux C.A.P. – pâtisserie puis cuisine – obtenus tout en travaillant, Emmanuelle passe par tous les postes d’un restaurant étoilé : le poisson, le garde-manger, la pâtisserie, la viande. « Le chef n’était pas facile, il était là depuis trente ans, partait à Rungis au petit matin et faisait la fermeture avec les derniers clients ». « La cuisine est un métier un peu rude dans les rapports humains », euphémise-t-elle. Le mode de vie est fort éloigné de celui des cadres fréquentés jusque-là dans son environnement professionnel, familial ou amical. Contraints à des horaires infernaux, la plupart des employés de cuisine n’ont en outre pas les moyens de vivre à Paris, et ils complètent leur journée de travail par de longs trajets en transports en commun.

Les générations précédentes de cadres ont connu leurs propres vagues de crise de sens. Certaines ont même été baptisées d’un petit nom – c’est le cas des « libraires I.B.M. », cadres en milieu de carrière dans les multinationales qui lâchaient tout pour ouvrir un commerce dans une ville moyenne de province. Ou du « syndrome de la chambre d’hôte », qui désigne ces mêmes profils qui s’installent en zone rurale, dans le Perche, le Luberon ou les Pyrénées pour ouvrir un lieu accueillant et chaleureux, souvent à l’âge de la pré-retraite. Mais les aspirations évoluent : face à la peur de rater sa vie et de s’ennuyer à mourir au bureau, les vocations surviennent de plus en plus précocement. Le nouveau chic consisterait à suivre la voie générale, puis à se réorienter dans la foulée vers un C.A.P. cuisine, pâtisserie ou boulangerie, afin de suivre ses envies. On choisira en particulier une institution prestigieuse, comme l’école Ferrandi à Paris, établissement privé onéreux à l’excellente réputation, devenu une sorte de H.E.C. ou de Sciences Po de la gastronomie et des métiers de bouche. Une nouvelle population que les lycées hôteliers voient également débarquer en formation initiale depuis quelques années, comme le signale l’augmentation du taux de pression (nombre d’élèves qui postulent pour entrer dans un établissement rapporté au nombre de places disponibles) dans ces filières. Dans le magazine professionnel L’hôtellerie-restauration, une directrice d’établissement commente : « Les parents disent à leurs enfants : “ Passe ton bac d’abord et fais une spécialisation en hôtellerie ensuite ”. »

C’est précisément ce qu’ils sont de plus en plus nombreux à faire. En conséquence, rapportait le magazine spécialisé en 2014, les lycées hôteliers sont désormais en tête de tableau des palmarès des établissements les plus demandés à Paris ou à Marseille, faisant jeu égal avec ceux qui accueillent les prestigieuses classes préparatoires aux grandes écoles – ces institutions jugées encore il y a peu comme le sanctuaire de la compétition scolaire à la française […]