Vegan Order

Par Marianne Celka

Broché (17,90 €)

Disponible sur Amazon, Fnac ou En librairie

224 pages

En bref

Serions-nous coupables de crime contre l’animalité ? Au fil des siècles, de nombreuses voix, de Pythagore à  Henry ­David Thoreau, se sont élevées pour remettre en cause la domination brutale des hommes sur les animaux. Aujourd’hui, la société toute entière est concernée par ce sujet, poussé sur le devant de la scène par de nouveaux activistes : L214 dénonçant l’enfer des abattoirs, Sea Shepherd menant de véritables batailles navales ou encore PETA et ses campagnes choc. Pourtant, si le véganisme s’affirme de nos jours comme un mode de vie valorisant, la sensibilité animaliste qui l’inspire relève souvent d’un véritable fondamentalisme. Acheter des steaks végétaux fait-il de vous un révolutionnaire ? Qui sont les éco-warriors et de quelle manière veulent-ils imposer leur vision du monde ? Les gourous animalistes sont-ils en train de trahir la cause ? En embrassant les points de vue politiques, écologiques ou économiques et en interrogeant les contre-cultures punk ou straight edge, Marianne Celka jette un regard critique sur l’histoire tourmentée de la libération animale, parfois rattrapée par un capitalisme ­enivré des sirènes de la compassion.

Marianne Celka, est enseignante-chercheur à l’Institut de Recherches Sociologiques et Anthropologiques, à l’université de Montpellier. Elle a publié un ouvrage collectif, Les dynamiques de l’imaginaire et collaboré à la rédaction de l’ouvrage de J. Porcher et Olivier Néron de Surgy, Encore carnivores demain ?. Elle est également secrétaire de rédaction de la revue Les Cahiers européens de l’imaginaire, au CNRS. 

 

Presse

Le bonbon.fr

Impossible aujourd’hui d’échapper au véganisme – « Ce mode de vie qui cherche à exclure, autant qu’il est possible et réalisable, toute forme d’exploitation et de cruauté envers les animaux, que ce soit pour se nourrir, s’habiller, ou pour tout autre but », comme le définit La Vegan Society. Comment ce mouvement a-t-il pris forme ? Par qui est-il incarné aujourd’hui ? Comment ce mouvement au demeurant radical s’est-il fait une place dans notre société ? Autant de questions qu’aborde la sociologue Marianne Celka dans son ouvrage […]

BFMTV.fr

Pour Marianne Celka, sociologue à l’université Paul-Valéry de Montpellier et auteur de Vegan Order, « il y a des différences de degré dans l’activisme » des animalistes. Un activisme qui va bien au-delà de L214 et de 269 Libération Animale. « C’est une nébuleuse assez complexe. Depuis les années 1960, il y a eu des cellules de libération animale, comme l’Animal Liberation Front (ALF), qui se sont déployées un peu partout en Europe et en Amérique. Et dès le début, cet activisme était radical, au sens du retour aux racines […]

RTS

Le mouvement végan sʹest dʹabord construit comme une véritable contre-culture comptant dans ses rangs des activistes, voire des éco-terroristes. Aujourdʹhui le mouvement se normalise, rattrapé par la tentation capitaliste. Le véganisme, un mode de vie aujourdʹhui valorisé, ouvre de nouveaux marchés […]

Sommaire

I. Nébuleuse animaliste

  • Spécisme et égalité animale
  • Une libération totale
  • L’argument dit des « cas marginaux »
  • Une communauté des égaux
  • Réformistes versus abolitionnistes
  • Vegetarianism et véganisme
  • Veni, Vidi, Vegani
  • Doxanalyse de l’animalisme
  • Scènes musicales et affinités radicales

II. Millénarisme

  • Écologie profonde et transcendantalisme
  • Le rejet de la chair
  • Suffragettes et Naturiens
  • La terre mère et le sentiment du sacre

III. Appels au grand soir

  • World Wi(l)d Web
  • Les leaders d’opinion et entre- preneurs de morale
  • Les cellules et le réseau
  • Animal Liberation Front
  • De nouveaux watchmen : pour les animaux et pour la terre
  • Night of knights – night of knifes
  • Pratique de l’activisme radical
  • Communauté de foi
  • La suspicion du complot

IV. Victoire et faillite du radicalisme

  • L’imaginaire animaliste
  • Sea Shepherd et éco-pirates
  •  Le capitaine Watson
  • People for Ethical Treatment of Animals
  • L’imagerie de PETA
  •  Gruesome footage & happening
  • Business de la radicalité : #maviedevegan
  •  Le paradoxe des conséquences
  • Le bonheur non-humain et l’avènement d’une societé exsangue

V. S’agiter hors de soi

  • De l’autre coté du miroir et juste aux bords
  • L’exorcisme hallucinatoire du réel
  • Dernières considérations
  • L’argument du plaisir

Extrait

L’Animal Liberation Front

L’ALF s’est construit autour d’un crédo :

« Le front de libération des animaux mène des actions directes à l’encontre de tout abus d’animaux, sous forme de libérations d’animaux et en causant des dégâts financiers aux entreprises qui les exploitent, habituellement par le biais de destructions de biens et de propriété ».

L’ALF poursuit un double objectif, à court et long termes. Il est d’abord question de sauver le plus grand nombre d’animaux possible et d’interrompre directement la pratique d’abus en tous genres à l’encontre des animaux. Par suite, il s’agit d’abolir la souffrance des animaux, en forçant les entreprises qui les torturent à mettre la clé sous la porte. Selon ses propres revendications, l’ALF invite à des campagnes d’actions non-violentes et encourage les activistes à prendre toutes les précautions afin qu’aucun animal – humain ou non-humain – ne soit blessé. Puisque toutes ces actions sont illégales, les activistes doivent faire montre d’une grande discrétion – en ce sens, l’absence de chef est supposée affermir les liens de proximité entre les militants et renforcer la dimension secrète de l’organisation. Le front de libération des animaux consiste ainsi en de petits groupes anonymes d’individus perpétrant des actions directes en allégeance au credo. Tout groupe réalisant des actions en accord avec les règles de conduite établies par l’ALF peut ainsi s’en revendiquer. Ces règles sont clairement édictées ; elles sont visibles et accessibles à tous afin que quiconque souhaite réaliser des actions au nom de l’ALF connaisse les limites qu’il ne faut franchir. Le credo s’affiche sous forme de devoirs à remplir :

« Devoir libérer les animaux de tous les lieux où ils sont victimes d’abus, c’est-à-dire laboratoires, fermes pour animaux destinés à la fourrure ou à l’alimentation etc., et les placer dans de bons foyers où ils pourront vivre de façon naturelle, loin de la souffrance. Devoir infliger des dommages financiers à ceux qui profitent de la misère et de l’exploitation des animaux. Devoir révéler l’horreur et les atrocités commises envers les animaux derrière des portes fermées, via des actions directes non violentes et des libérations d’animaux. Devoir prendre toutes les précautions nécessaires pour ne pas blesser d’animaux, humains ou non-humains. Devoir analyser les conséquences de toutes les actions proposées, et ne jamais faire de généralisations lorsqu’une information spécifique est disponible ».

Concrètement, les actions de libération des animaux se déroulent à l’aube ou au crépuscule, à la seule lueur de torches électriques. À la manière décrite par Jean-Christophe Rufin, les libérateurs s’immiscent au cœur des exploitations animales, fermes concentrationnaires, laboratoires d’expérimentation, élevages intensifs, tous ces lieux où règnent la mort, l’injustice et la cruauté, aux périphéries des grandes agglomérations :

« La serrure n’opposa aucune résistance à l’action du pied-de-biche. Dans l’obscurité, elle atteignit à bout de bras le boîtier électrique et actionna l’interrupteur. Brutalement, la lumière blanche des néons inonda l’animalerie. La seule surprise était l’odeur. […] Ensuite, elle s’était avancée vers les cages ».

Munis de pinces-monseigneurs ou de pieds-de-biche, les activistes font sauter les verrous, libèrent les « frères non-humains » et défoncent tout ce qui peut l’être, laissant derrière eux quelques mots doux à l’attention des tortionnaires : « ALF te surveille ! » ou encore « La prochaine fois on s’invite chez toi ! ». Les libérateurs se placent de fait dans le cadre d’une liberté « infra » sociale, celle qui s’exerce au-dessous des lois, dans les bas-fonds, jouissant de cette liberté d’ordinaire fantasmée. Une liberté d’action et de morale qui n’est pas sans rappeler celle des héros bandits, issus de la pègre qui peuplent les écrans de cinéma ou de télévision. Une liberté dont Edgar Morin rappelle à quel point elle peut être – en tant que liberté anthropologique et non politique – violente et subversive, ou du moins enjeu d’une catharsis fondamentale. C’est la liberté de celui qui appartient au gang (The Monkey Wrench Gang rappelons-le), liberté du héros qui lutte pour la Loi contre les lois.